L’Abbaye de Cluny - Son influence géopolitique,
spirituelle et religieuse sur la Société du 10e siècle
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Le samedi 7 février dernier, dans la grande salle du château, et devant un auditoire captivé d’une cinquantaine de personnes, Louis Carrier, ingénieur des Arts et Métiers, présentait l’histoire de l’abbaye de Cluny.
L’éclatement de l’Empire carolingien amorcé par le traité de Verdun en 843
- ouvre la porte aux invasions viking, magyar et sarrasine ;
- élimine tout pouvoir central et donc aggrave l’insécurité du territoire ;
- accélère simonie et dépravation dans les monastères existants.
Guillaume le Pieux, Duc d’Aquitaine, Comte d’Auvergne, du Limousin, du Berry, de Lyon et de Macon, Marquis de Gothie et Abbé laïc de Saint Julien de Brioude et descendant de Charles Martel édicte en 909 la Charte de création d’un monastère sur ses terres de Cluny.
Monastère obéissant à la règle de Saint Benoît et placé sous l’autorité de la papauté pour être soustrait des rivalités des seigneurs et évêques locaux.
Sous la direction d’abbés issus de l’aristocratie de l’époque mais avec des personnalités hors du commun, Cluny va connaître une expansion qui connaitra son apogée autour des années 1100.
Alors que pendant 150 ans, la papauté a connu 23 papes, (sans compter les faux papes), Cluny n’a connu que 3 abbés : Mayeul, Odilon et Hugues de Semur.
Organisé comme une multinationale, Cluny avait le privilège de battre monnaie, de rendre justice, de reprendre en main les monastères existants en perte de vitesse. Outre son « siège social » l’abbaye de Cluny comptait jusqu’à 1 400 filiales (les prieurés couvrant tout le territoire européen), 10 000 moines et une trentaine de couvents de moniales. Il était d’usage de dire « Partout où il vente, Cluny a rente ».
Appuis de la papauté (3 papes Grégoire VII, Urbain II et Pascal II sont d’anciens moines de Cluny ), conseillers des rois et empereurs, les abbés cumulent pouvoir spirituel et pouvoir temporel.
L’Abbaye Cluny III construite sous l’abbatiat de Saint Hugues est la construction la plus prestigieuse de l’époque. Elle sera dépassée par la suite par Saint Pierre de Rome.
Cet excès de pouvoir amène à prendre des libertés avec la règle Saint Benoît, à porter ombrage aux pouvoirs royaux environnants et pousse Rome à favoriser l’émergence d’ordres religieux plus dociles et plus respectueux de la règle de Saint Benoît.
L’émergence des Cisterciens, des Chartreux puis des ordres mendiants, puis la reprise par la royauté du pouvoir de battre monnaie entraînera un lent mais inéluctable déclin de l’ordre de Cluny.
Le coup de grâce sera apporté par la Révolution Française qui chassera les moines et transformera l’abbaye en carrière de pierres destinées à la construction locale.
La partie épargnée par la démolition abrite actuellement un Centre de l’École Nationale d’Ingénieurs des Arts et Métiers.